Le Dr Françoise Pinguet est gynécologue. Elle a bien voulu répondre à nos questions sur la fécondité, la contraception et les méthodes naturelles.
Corpsfeminin.com : Comment définir l’acte sexuel ?
Dr. Françoise Pinguet : Le désir sexuel, comme tout désir, est une pulsion qui donne envie d’être satisfaite, car elle est source de plaisir. Ici ce plaisir est lié à une relation entre un homme et une femme. Les deux sont donc concernés. Chez les animaux c’est un instinct non contrôlable. Pour nous, en tant qu’être humain libre, nous sommes invités à décider d’obéir ou non à cette pulsion : à chacun de choisir soit il en fait un acte totalement égoïste, voir violent, pour son seul plaisir, mais est-ce un acte humain ? Soit il le fait pour dire à l’autre qu’il se donne à lui pour l’aimer
Corpsfeminin.com : Quelles sont les différences fondamentales entre le corps féminin et le corps masculin ?
Dr. F. P. : Les organes génitaux de la femme sont essentiellement à l’intérieur de son corps, ceux de l’homme à l’extérieur. C’est l’aspect anatomique. La femme vit dans son corps ce qu’on appelle les règles mais entre 2 règles il se passe beaucoup de choses dans son corps pour lui permettre si tel est son souhait de porter un enfant suite à un acte sexuel. Chez l’homme qui est fertile en permanence, il ne perçoit rien de sa fertilité mais uniquement du fonctionnement des organes génitaux externes. Si l’être humain est composé d’un corps, il vit aussi, de sentiments, de phénomènes psychologiques, de désirs différents. Pour la femme, il y a souvent des liens forts entre ce qu’elle vit dans son corps et au niveau de ses sentiments, de tout son être. Pour l’homme, il peut vivre une sexualité sans aucune participation affective, avec un aspect dirons-nous uniquement mécanique.
Corpsfeminin.com : Quelles incidences cela a-t-il sur l’acte sexuel ?
Dr. F. P. : Il est évident que l’homme et la femme ne vivent pas l’acte sexuel de la même manière. La femme a besoin d’être désirée mais pas uniquement pour son corps même si sa tenue parfois fait tout pour stimuler le désir masculin. La femme attend de la tendresse, de la patience, des paroles d’affection, autrement dit une relation, quand parfois l’homme propose une performance, voir une rapidité. Par peur de déplaire, la femme peut se satisfaire de la vision masculine de l’acte sexuel et par peur d’être lâchée, elle s’en satisfait : Plutôt plaire à l’autre même si elle attend vraiment autre chose.
Corpsfeminin.com : Il y a un lien, scientifiquement, entre corps féminin et maternité ?
Dr. F. P. : A ce jour tout être humain a été porté dans l’utérus d’une femme. A priori une femme qui accouche d’un enfant est déjà sa mère depuis environ 9 mois. C’est le premier sens du terme maternité. Une femme, peut adopter un enfant, certes, elle est mère adoptive, et celle qui a accouché est la mère naturelle. On sait bien qu’adopter un enfant est une véritable aventure parfois avec des épreuves, car la rupture à la naissance avec celle qui l’a porté est un choc psychologique pour l’enfant. C’est le syndrome d’abandon bien connu des psychologues.
Corpsfeminin.com : Y-a-t-il des risques que les jeunes filles et les femmes délèguent aux médecins, en particulier gynécologues, la gestion de leur fécondité ?
Dr. F. P. : La fertilité n’est pas me semble-t-il une maladie contre laquelle il faut se protéger. Etre fertile est un signe de bonne santé tant pour l’homme que pour la femme. Le désir d’enfant existe chez la femme et il est très important. Tant qu’une femme n’aura pas été enceinte, elle sera plus ou moins inquiète de sa fertilité. L’homme ne se pose pas la question. Du moment que l’acte sexuel fonctionne, tout doit suivre. Si l’homme est fertile tous les jours, la femme ne l’est qu’à une certaine période au cours du cycle. Pourquoi prendre un médicament qui va supprimer les quelques jours de fertilité de la femme, alors que la science permet aujourd’hui de repérer la période fertile ? Quel est l’homme qui souhaite devenir infertile pendant des mois voire des années ? Pourquoi s’en remettre au pouvoir médical ?
Corpsfeminin.com : Il y aurait donc un « biopouvoir » sur le corps féminin ?
Dr. F. P. : Le corps féminin devient source de profit pour les laboratoires, et dépendant des techniques médicales
Corpsfeminin.com : Et que pensez-vous du stérilet ?
Dr. F. P. : Le stérilet est un petit appareil en plastic recouvert d’un fil de cuivre. Il est posé à l’intérieur de l’utérus. Il n’a aucune action sur les ovaires donc le cycle fonctionne normalement. Les spermatozoïdes traversent l’utérus en direction des ovaires et ne sont pas gênés par le stérilet. Si une fécondation a lieu, le petit embryon arrive le 6ème jour de son existence dans l’utérus pour s’y accrocher, c’est la nidation. Mais la présence irritante du stérilet fait que cette nidation devient impossible et il est expulsé rapidement.
Corpsfeminin.com : Vous avez participé au livre « se passer de la pilule, c’est possible » : quels sont les risques de se passer de la pilule ?
Dr. F. P. : Ce qui est risqué c’est de poser un acte sans réfléchir sur le pourquoi de cet acte. Une femme qui prend la pilule ne souhaite pas attendre un enfant. Avant d’arrêter il faut donc savoir ce qu’elle va faire pour ne pas attendre de bébé : un autre moyen de contraception ? lequel ? une méthode naturelle ? Pourquoi pas mais dans ce cas, la participation de son mari ou de son partenaire est indispensable car c’est un mode vie pour le couple qui demande la pleine participation des deux. La fertilité est celle du couple et non pas celle de l’homme ou de la femme. Ils sont fertiles quand ils sont ensemble mais chacun tout seul est infertile !
Corpsfeminin.com : Et quels sont les avantages de s’en passer ?
Dr. F. P. : Se passer de la pilule, c’est découvrir un autre mode de vie de couple. Pour la femme, c’est découvrir son corps et l’accueillir dans son intimité et sa richesse : pouvoir accueillir en elle un enfant. C’est découvrir un mode vie sexuelle basé sur le dialogue au sein du couple. C’est une relation fondée sur le désir de s’aimer dans la durée. C’est aider à parler ensemble, du désir sexuel, du désir d’enfant, de la qualité des relations sexuelles, des attentes, des déceptions. C’est enrichir la relation physique par la tendresse gratuite, l’écoute de l’autre, la découverte de l’autre. C’est un vrai chemin de bonheur et lien fort entre l’homme et la femme.
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